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Turinabol: le secret de la RDA

  • Photo du rédacteur: Biohacking France
    Biohacking France
  • 24 juil. 2024
  • 6 min de lecture

Dernière mise à jour : 14 janv.


RDA (ex-Allemagne de l’est): la motivation derrière la création du Turinabol. Entre exploits sportifs et scandales.

Lors de la Guerre Froide (1947-1991) qui opposa le bloc de l’Ouest sous domination américaine au bloc de l’est URSS, la compétition faisait rage et ce même dans les événements sportifs. 
Tout ce qui pouvait avantager un camp plutôt que l’autre devait être mis en avant, et ce même si cette aide venait du monde pharmacologique. 
Les américains avaient le Dianabol,  les Russes avaient les injections de testostérone.
 La RDA (ex-Allemagne de l’est) se devait donc d’innover pour rester dans le top de la compétition.
 En effet, malgré la défaite lors de la seconde guerre mondiale, l’Allemagne de l’Est était toujours la 3ème puissance sportive mondiale derrière les États-Unis et l’URSS. Bien qu’affiliée politiquement à cette dernière, son ambition de dépasser les deux blocs dans les compétitions sportives n’en était pas moins affirmées. Cette volonté de s’affirmer sportivement fut la motivation derrière la création du Turinabol.

Origines :


Avant d’exister en tant qu’entreprise, Jenapharm était à l’origine un simple institut de microbiologie fondé en 1944 et situé dans la ville de Jena.
Doté d’uniquement 9 employés, c’est cependant dans cette institut que Hans Knoll synthétisa la Pénicilline puis en permit la  distribution dans la RDA.

Après la défaite de l’Axe, les entreprises pharmaceutiques restantes de l’Allemagne Nazi se trouvait à l’Ouest, sous contrôle occidental, donc inutilisables pour la RDA.
Cependant l’institut de Jena, qui se situait à l’Est, possédait assez de ressource pour commencer une petite production pharmaceutique.

En 1949 Jenapharm obtenu ainsi l’autorisation de créer et de mettre sur le marché des stéroïdes. À cette époque l’entreprise était déjà passé de 9 employés à 600. Dès son officialisation en tant qu’entreprise, cette dernière s’est immédiatement focalisée sur la recherche et le développement des stéroïdes: corticostéroïdes mais également stéroïdes anabolisants, œstrogènes, progestérone…

Jenapharm n’était absolument pas un laboratoire obscur mais bien une entreprise reconnu et essentiel à la société de l’époque. En effet, avant la réunification, Jenapharm était l’unique fournisseur de contraceptifs hormonaux de toute l’Allemagne de l’Est.
C’est cependant en 1965 que l’entreprise pharmaceutique Jenapharm accoucha de son dernier projet: le Turinabol. 


Le Turinabol : stéroïde anabolisant deviendra la clé de voute d’un programme secret de dopage national, notamment chez les nageurs et les gymnastes.

Ci dessus les locaux de Jenapharm (source: https://en.wikipedia.org/wiki/Jenapharm)
Ci dessus les locaux de Jenapharm (source: https://en.wikipedia.org/wiki/Jenapharm)

Origine du Turinabol


Nom chimique complet: Chlorodehydromethyltestostérone
Formule Chimique: C20H27CIO2

Le Turinabol est en fait un dérivé du Dianabol. 

Crée par le docteur John Ziegler, le Dianabol était le stéroïde anabolisant de prédilection de l’équipe olympique américaine. Extrêmement efficace pour la prise de force et de masse musculaire, ce stéroïde a cependant le défaut de mener à une rétention d’eau importante ce qui impacte négativement l’endurance, le foie (méthylation en position 17-alpha) et la santé cardiovasculaire (lié entre autre à une pression sanguine élevé…). 

La RDA était intéressée par l’amélioration de la performance du Dianabol mais ne souhaitait pas tant d’effets secondaires. Les scientifiques de Jenapharm ont donc modifié la composition du Dianabol en liant la molécule de methandrostenolone avec du Clostébol. 

Le Clostébol est un autre stéroïde dérivé de la testostérone avec un atome de chlore ajouté à la position 4 du cycle androstane, ce qui limite son interaction avec l’enzyme aromatase et diminue ainsi les effets secondaires liés aux œstrogènes.

Ce mélange donna naissance au Turinabol, un nouvel agent dopant aux propriété beaucoup plus intéressante pour les participants aux jeux Olympiques de l’époque. 

Les responsables de la RDA découvrirent que le Turinabol, bien que possédant une méthylation en position 17-alpha, présentait une faible toxicité au niveau du foie. Il pouvait donc être dosé toute l’année (contrairement au Dianabol).

Il était également difficile à détecter dans les test anti-dopages. Ce fut une chance pour la RDA, leurs concurrents ignorant jusqu’à l’existence même du Turinabol. De plus la demi vie du Turinabol est d’environ 16 heures, ce qui permet une utilisation plus simple que le Dianabol (qui nécessite des prises assez fréquente car sa demi-vie n'est)

Contrairement à ce dernier, le Turinabol ne présente pas vraiment un aspect cosmétique particulier mais c’est surtout sur les performances physiques que ce dernier se distingue: les athlètes de l’époque sont capable de courir plus vite, de réagir plus vite, leur force est décuplée et ce stéroïde n’a pas d’impact sur leur capacité respiratoire, au contraire. 

Il fut également donné aux athlètes femmes et adolescentes car l’effet du Turinabol était particulièrement drastique sur ces dernières (et même parfois sur des jeunes filles de 10-12 ans).
Ce n’est pas un stéroïde très androgénique mais sur la durée il causa malheureusement une virilisation chez ces femmes: hirsutisme, voix grave, infertilité… Certaines femmes ont subi un tel bouleversement hormonal qu’elles changèrent de sexe.


Bien qu’étant moins prononcés que chez le Dianabol, les effets secondaires existent également pour le Turinabol. On retrouve une augmentation du cholestérol LDL et une baisse du cholestérol HDL. Le compte de globules rouges augmentent également. Le taux de testostérone est diminué via la réduction de l’hormone lutéine (LH) et de l’hormone folliculo-stimulante (FSH). 


Turinabol et compétitions


L’impact du Turinabol a été particulièrement remarquable dans les années 70-80 avec une augmentation des doses pour tous les athlètes durant cette décennie.

Il faut noter que les athlètes concernés n’étaient pas conscient de cette consommation de stéroïdes anabolisants. En effet les coachs leur assuraient que ce n’était que des vitamines afin de les aider à supporter l’entraînement.

Ainsi les médecins, les entraineurs et les officiels sportifs de la RDA ont tous été impliqués dans ces pratiques. Pour les athlètes qui l’apprenaient, le refus de se plier à ce programme impliquait le renvoi définitif de l’équipe Olympique et l’arrêt de toute carrière sportive.

Cette consommation permit aux athlètes de la RDA d’empocher 11 médailles sur 13 lors des jeux olympiques de 1976 à Montreal. 

Cette domination fut tellement choquante que les journalistes firent remarquer la voix anormalement grave des nageuses allemandes. L’utilisation du Turinabol permit donc à la RDA de rester dans la course aux médailles avec les géants américains et russes.


 L’athlète Heike Dreschler qui fit parti de ce programme de dopage national. C’est surtout entre 1982 et 1984 qu’elle usa d’injections de testostérone et de turinabol. Source: https://en.wikipedia.org/wiki/Heike_Drechsler
  L’athlète Heike Dreschler qui fit parti de ce programme de dopage national.
C’est surtout entre 1982 et 1984 qu’elle usa d’injections de testostérone et de turinabol.


Turinabol et scandales


Ce n'est qu'après la chute du mur de Berlin que le premier scandale éclate. 
L’existence du Turinabol est révélé au grand public ainsi que son utilisation par l’équipe olympique de la RDA. Un vaste programme secret de dopage systémique organisé par la STASI (ministère de la sécurité d’état) fut dévoilé et après plusieurs procès certains responsables furent condamnés. 

La production de Turinabol a donc officiellement cessée en 1994 et ce dernier s’est alors retrouvé sur le marché noir.
Malgré son interdiction les conséquences de plusieurs décennies d’abus de Turinabol ont laissées des séquelles chez de nombreux athlètes de la ex-RDA: 2/3 d’entre eux sont atteint de trouble psychiques, 1 quart est sujets à divers cancers et de lésions du foie. Le Turinabol a également causé des dérèglements hormonaux et des problèmes de stérilité. Chez ces athlètes, le taux de fausse couche est de 32 fois supérieur à la moyenne.


En 2005 c’est 160 athlètes qui portent plaintes. Ces athlètes souffrants d’effets secondaires liés au dopage de masse ont alors été dédommagés d’un montant de 9250 euros.

Le Turinabol aujourd’hui


Le Turinabol n’est aujourd’hui disponible que sur le marché noir. Cela ne l’empêche pas de refaire irruption dans l’actualité comme lorsque Jon Jones, grand champion de MMA, s’est retrouvé suspendu après la découverte d’un métabolite de Turinabol dans son sang. Il y’a également eu des disqualifications d’athlètes lors des jeux olympiques de 2012 à Londres pour cette même raison. 

Jon Jones qui fut disqualifié après la découverte de métabolites de Turinabol dans son organisme. Source: https://medium.com/@tommulligan_92895/jon-jones-the-turinabol-mystery-continues-7e2331e94c01
 Jon Jones qui fut disqualifié après la découverte de métabolites de Turinabol dans son organisme.

Turinabol et Halodrol


Le Turinabol a fait indirectement un retour en 2005 lorsque un complément nommé Halodrol-50 sortit sur le marché.
C’est l’entreprise Gaspari Nutrition qui en fut à l’origine. L’Halodrol est en réalité une prohormone au Turinabol, c’est à dire que lors de la métabolisation de l’Halodrol dans le corps, une partie se convertit en Turinabol.
Cela permit à Gaspari Nutrition de ne pas être dans l’illégalité tout en commercialisant une drogue extrêmement puissante. 
En effet au début des années 2000 les prohormones faisaient partis, légalement, d’une zone « grise » ce qui permit leur commercialisation auprès du grand publique. 

On pouvait ainsi trouvés des produits comme le Superdrol, le Trenavar ou encore l’Halodrol dans un simple magasin de sport. La justice se pencha assez rapidement sur cette affaire et l'halodrol fut officiellement discontinué en 2006. Cependant de nombreux clones de ce supplément se trouve encore sur internet.

 L'Halodrol-50 qui permit d’obtenir les effets du Turinabol de façon légal pendant un court laps de temps.   Source: https://bigdansfitness.com/products/halodrol-cycle-prohormone-stack-free-nolvedext-xt-pct







 L'Halodrol-50 qui permit d’obtenir les effets du Turinabol de façon légal pendant un court laps de temps.





Turinabol et dosages

La durée est généralement de 6 à 10 semaines.
10-40 mg par jour pour les hommes.
2,5mg par jour pour les femmes.

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